"Brasser de l'air et s'envoler" de et avec Xavier Guelfi : un poète-clownesque et le monde s’éclaire !

À voir si : vous avez le cœur léger et passionné

Les mercredis du 10 janvier au 17 avril 2024
au Théâtre de la Flèche

© Christophe Raynaud Delage


“C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision d’arrêter tous les trucs en ions, l'introspection, les tergiversations, l’hésitation, les oscillations, les contradictions, arrêter de tourner en rond,(…) pour me tourner réellement, vers vous, vers les autres, vers l’humanité”

Brasser de l’air et s’envoler, Xavier Guelfi


Seul en scène intelligent, poétique et charmant, « Brasser de l’air et s’envoler » rappelle que les clowns ont une baguette magique : faire de l’humour tendre un puissant vecteur de changement. Le réenchantement, c’est maintenant. Alors, on s’envole ?

Sur la scène du joli théâtre La Flèche, une machine à laver (et bientôt à rêver), quelques carottes et un pouf en plastique s’apprêtent à faire le show. D’un coup, l’acteur débarque, un peu gauche, ponctuant toutes ses phrases - délicieusement à rallonge - d’un petit rire gêné. Il s’excuserait presque de demander pardon. Les cheveux en bataille tel un oiseau sorti du nid, il se prépare un jus pour « relâcher la pression », se lançant dans une explication délirante sur le pourquoi du comment cette mixture lui permet de se produire le plus relax possible devant nous, pour finir par révéler, qu’en vrai, il ne sait pas où il va… Le titre, déjà, annonçait une folie douce et nous avait mis l’eau à la bouche. Ce bavardage élégant et désopilant dont la finalité est de retrouver foi en l’humanité nous a totalement emballés. Xavier, président ! (du monde de demain, utopique, poétique, pas Bisounours mais pas « béninonnon » non plus…)

Un one man poético-show qui réenchante le monde

Enchaînant les réflexions existentielles cocasses dans lesquelles tout un chacun peut se reconnaître - « Cesse ta petite révolution puérile », lui dira son père, « fonde une famille, pratique un sport (…) tiens-toi droit, va chercher tes chaussons et rendez-vous dans le jardin dans dix minutes, tu vas (…) comprendre ce que c’est que le labeur, le travail !, Xavier Guelfi interroge la place de l’artiste aussi bien que celle de l’être humain du XXIème siècle. Il raconte une génération désemparée - désenchantééée comme dirait Mylène, biberonnée aux conceptualisations (encore des trucs en “ions” !) les plus ridicules qui soient pour rester optimiste, noyée dans la culpabilité du manque de sens permanent tandis qu’une partie du monde est plongée sous les bombes. Le tout est amené avec un naturel désarmant, avec la légèreté du gars un peu à côté de la plaque refusant un monde sans idéal et qui argumente et rêve en rimant. Avec acrobaties garanties… même si l’envol ne l’est pas à proprement parler ! (rires).
Une petite (grande !) poésie qui change tout et qui donne à ce spectacle unique un charme fou.

Un clown (visionnaire) des temps modernes

Apartés avait découvert Xavier Guelfi au Festival d’Avignon 2019 dans deux rôles très différents. Impossible d’y être indifférent. En garçon d’apparence affable se métamorphosant en épouvantable séquestrateur dans le huis-clos « After the End » adapté par Antonin Chalon ou en jeunot (hilarant Jean-Jean malgré lui) paumé, dégoûté par la vie et à la recherche d’une rédemption dans l’ovni « Sosies » de Rémi De Vos, il irradiait. On peut se repasser en boucle ses passages sans jamais se lasser.
S’il a décidé de pondre les œufs d’un nouveau monde dans son spectacle, la couvade a, pour lui-même, fonctionné : un comédien-auteur est né. L’air de ne pas y toucher, jouant à l’ahuri façon doux rêveur, Xavier Guelfi radiographie avec une finesse toute poétique et une dinguerie loufoque les nombreuses casseroles de notre époque. Où il est beaucoup question d’écologie, avec une magique plaidoirie des animaux que n’aurait pas reniée La Fontaine. Les pépites sont nombreuses et on craque pour la leçon de vie contrariée Claude Rich/Jean-Pierre Bacri : « Concrètement j'ai perdu les pédales. Je suis rentré dans une addiction totale, je trouvais tout le monde génial ! (…) Bacri il n'aime pas ça, les sourires systématiques, il est génial Bacri ! Mais Claude Rich, lui il dit que c’est beau... il est génial ! Je devenais complètement con, j’étais entremêlé dans des espèces de contradictions sans fond, moi déjà je savais pas qui je voulais être mais là je savais plus qui je voulais être parmi ceux que je voulais être ». On brasse joyeusement de l’air avec ce Pierrot lunaire au débit frénétique et fantaisiste et… on s’envole, oui, oui… Car, finalement, les meilleures soirées ne sont-elles pas toujours celles où on refait le monde ?

« Brasser de l’air et s’envoler », écrit, joué et mis en scène par Xavier Guelfi

Durée : 1h10

Bande-annonce du spectacle « Brasser de l’air et s’envoler » de et avec Xavier Guelfi